The Freaks Are Stealing Our Sunshine
Lorsqu’il trouve sa voie à travers la peinture, Bill Saylor avance sans plan spécifique. Sans idées prédéfinies ou compositions prévues à l’avance, laissant la peinture se faire dans sa matérialité même. Certaines images surgissent en chemin — une flamme, une méduse, des yeux, des soleils, des tentacules ou des dents. On peut supposer qu’elles proviennent de son enfance passée dans la nature sauvage de Pennsylvanie où son père élevait des pigeons voyageurs et où les paysages industriels menaçaient toujours un peu la nature. Ou peut être de son expérience de plongeur dans les eaux profondes de Californie. Ou alors, tout simplement, de ses rêves.
Peu importe, car très vite les images ne comptent plus. On quitte le confort du réalisme. La peinture seule prend le dessus. On s’enfonce dans ses couches multiples, dans ses couleurs saisissantes Dans les formes pures. De grands espaces surnaturels qui deviennent peinture.
Bill Saylor peint à l’extérieur, dans l’immensité d’un champ de Pennsylvanie. Ou alors, entre les quatre murs resserrés de son atelier de Bushwick, à Brooklyn. Dans ces deux lieux, il est traversé de plein fouet par les éléments. En premier lieu : la météo. Ce dernier été, particulièrement aride, l’a obligé à quitter la Pennsylvanie pour se réfugier à New York. Les hautes températures ont influencé sur sa psychologie, et sur la matérialité même de ses tableaux. Les couleurs n’en sont que plus brûlantes. Et le titre de son exposition — « The Freaks Are Stealing Our Sunshine » — raconte comment le réchauffement climatique, et ses responsables, transforment le soleil en un ennemi, bannissant la joie habituellement provoquée par ses rayons.
Depuis les années 90, Bill Saylor peint. Bien avant Internet et Instagram. Bien avant que la peinture se retrouve enfermée dans les écrans de nos téléphones. Figure originelle de la scène du « Meat Packing District » de Manhattan, où il a d’abord montré des œuvres lors des expositions itinérantes de Kenny Schachter puis ensuite à Brooklyn, Bill Saylor est une inspiration pour un grand nombre d’artistes — de Jordy Kerwick à Eddie Martinez en passant par Katherine Bernhardt. Sa carrière est unique dans sa durée, dans son engagement et sa densité.
Il est représenté par la galerie Magenta Plains à New York et la Loyal Gallery de Stockholm. Il a été artiste en résidence à la Chinati Foundation à Marfa.
« The Freaks Are Stealing Our Sunshine » est sa première exposition en France. cadet capela tenait à montrer l’œuvre d’un artiste décisif pour toute une génération d’artistes. Et pour de nombreux artistes représentés par la galerie.
Boris Bergmann