Rue du Canal

© Courtesy of Ken Sortais, Rhys Lee and cadet capela
© Credits photo: Thomas Marroni

Ken Sortais

28 novembre — 14 décembre 2019

Rue Saint Claude, Paris, FR

À travers sa pratique aux multiples facettes, Ken Sortais crée des œuvres très hétéroclites, se concentrant souvent sur la relation entre la création, la subversion et la perte de l’identité. Travaillant avec une variété de médiums et de techniques, du dessin à la peinture en passant par la vidéo, la sculpture et l’installation, l’illégalité est une composante omniprésente du processus créatif. Transcendé par son expérience du graffiti illégal, cet aspect important de l’œuvre contribue au côté performatif et théâtral de sa méthodologie, point de départ de la manipulation technique et de l’expérimentation.

Pour sa première exposition avec cadet capela, Sortais a préparé une série de nouvelles pièces de sa série Sculpt’air en cours ainsi qu’une sélection de dessins en noir et blanc qui s’y rapportent. Conformément à ses efforts pour faire des analogies entre les mythes et leurs représentations dans l’espace public, ses œuvres font des ponts entre différents héritages historiques, permettant l’entrelacement de fantasmes abstraits surréalistes et extrêmes et d’une esthétique traditionnelle. Les sculptures en latex sont réalisées à partir d’empreintes illégales faites sur de vraies statues du 19ème siècle cachées dans des endroits abandonnés et/ou oubliés. Le moule en latex est ensuite retourné et rempli d’air ou de mousse, l’œuvre étant ainsi le négatif de la sculpture initiale. L’étape de remplissage des moules expansifs accentue les défigurations et déformations de l’original qui peuvent parfois tendre vers l’abstraction. Ces anomalies sont par surcroît renforcées par la surface brute qui concoure à l’aspect grotesque de certaines formes et suggère la marque du temps, tout en contribuant à la dimension organique et évolutive de l’œuvre.

Capable de jouer avec l’échelle, des bustes traditionnels à la sculpture à taille humaine de modèles égyptiens, Sortais garde la mémoire des objets originaux tout en leur donnant un nouvel aspect. A la fois beaux et monstrueux, dignes et grotesques, leurs corps lisses et rebondissants sont en forte contradiction avec leurs visages grimaçants et très expressifs. Par un processus unique qui évoque la casse et le pillage de monuments, la mutation du matériel en morceaux, l’expérimentation technique et la déformation, il confronte et détourne les formes symboliques qu’il attribue aux formats existants. En remplaçant l’impression monumentale et stoïque de l’original par l’aspect libre et absurde de sa copie gonflée, Sortais questionne la représentation des formes qui nous entourent à travers les gestes de détournement et de manipulation, passant sans effort du réel à l’illusion.

Sasha Bogojev