© Credits photo: Thomas Marroni
Cydne Jasmin Coleby & Rico Gatson
© Credits photo: Thomas Marroni
Pour le premier « duo show » du nouvel espace de la rue Béranger, cadet capela présente les œuvres de deux artistes, Cydne Jasmin Coleby et Rico Gatson. Deux univers aux couleurs primordiales. Deux expériences artistiques qui s’éprouvent de manière sensorielle.
Pour peindre, Cydne Jasmin Coleby s’inspire d’anciennes photos de famille et des expériences passées. Ou de son propre visage. Ses autoportraits mêlent les textures et les motifs. Comme des collages, ils révèlent toute sa dualité, sa pluralité. Née au Bahamas, marquée par l’identité caribéenne, Cydne Jasmin Coleby a étudié le design graphique. Elle a gardé une maîtrise des couleurs et se joue en permanence de sa « palette tropicale ». Elle s’inspire également des couleurs criardes et fluo du festival Junk-a-noo, de ses parades colorées, de ses déguisements.
Mais au-delà de la carte postale figée et du cliché, Cydne Jasmin Coleby laisse transparaître tous les écueils d’une société postcoloniale : économie fébrile, difficultés financières, jeunesse rêvant d’ailleurs, réchauffement climatique… La nature apparaît, sous forme d’arbre ou de fruits, comme omniprésente. La peintre veut rappeler le lien charnel qui la lie à sa terre originelle. C’est là où elle puise toute son inspiration.
Pour Rico Gatson, qui est né dans le Sud des Etats-Unis, en Géorgie, c’est le soleil de Californie qui revient comme un motif entêtant. L’artiste y a déménagé quand il était enfant. Et il récrée, avec ses visions quasi-cinétiques, les « sunsets » californiens dont la lumière est « gratuite pour tous » et porteuse d’espoir.
Mais dans ses tableaux, la géométrie n’est jamais pure abstraction. Certaines formes surgissent, bien réelles. Comme le drapeau américain, que l’artiste recrée pour en offrir une vision plus ouverte, plus inclusive. Et plus revendicative.
Inspiré par tout le spectre de la musique noire américaine, Rico Gatson traduit l’énergie des sons et des rythmes dans ses choix de couleurs. L’artiste est également marqué par l’esthétique afro-futuriste empruntée aux musiciens de free jazz — de Albert Ayler à Yusef Lateef — de funk — Parliaments et Funkadelic — et de rap. Les formes géométriques se changent en puissances spirituelles, transcendantales et symboliques.
L’artiste cite également l’importance du mouvement politique Black Lives Matter. Ses œuvres traduisent subtilement son engagement personnel.
Pour ce premier duo show, deux sensibilités dialoguent, deux visions se mêlent. Mais la question de l’identité traverse les deux œuvres, chacune à sa manière. On peut résumer cette rencontre avec les mots de Cydne Jasmin Coleby à propos de son lien avec Rico Gatson : « Même si on n’a pas le même sujet, nous parlons le même langage ».
Boris Bergmann